Alors que la situation en Haïti ne cesse de s’envenimer, de nouveaux effectifs policiers du Guatemala et du Salvador sont arrivés ces vendredi 3 et samedi 4 janvier 2025, dans le cadre de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS). Le contingent guatémaltèque se compose d’une unité de police militaire de 150 personnes. 8 membres des forces policières du Salvador ont également rejoint la mission. Ces forces rassemblent des hommes et des femmes, toutes et tous sont « doté·e·s de compétences, de connaissances et d’expertises variées, et renforceront considérablement l’efficacité opérationnelle de la mission », a déclaré la MMAS dans un communiqué diffusé sur sa page Facebook. Le commandant des forces de la mission, Godfrey Otunge, « a mis en garde les gangs criminels, affirmant que 2025 serait une année difficile pour eux. Il leur a donné deux choix : se rendre, déposer les armes et faire face à la justice, ou affronter la MSS lors d’opérations décisives, alors que la mission entre dans une phase critique », précise le communiqué de la mission. Otunge a également rappelé aux pays n’ayant pas encore fourni l’aide promise à le faire sans délai, qu’elle soit financière, en matériel ou en personnel humain.
Cette mission, pilotée par le Kenya et soutenue financièrement en majeure partie par les États-Unis, a été approuvée par le Conseil de sécurité des Nations unies le 2 octobre 2023 dans sa résolution 2699 (S/RES/2699). Elle a été reconduite pour un an en septembre 2024 (S/RES/2751). Ces nouveaux contingents rejoignent ceux du Kenya, de la Jamaïque, des Bahamas et du Belize, déjà déployés sur le terrain. La mission se trouve aujourd’hui dans une phase critique : autant l’escalade de la violence que la faible coopération internationale limitent fortement son potentiel, tel que le décrit un article récent de Afrique XXI.
D’après le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies, ce sont 5 601 personnes qui ont perdu la vie dans les affrontements entre gangs, population civile et forces de l’ordre en Haïti en 2024, soit 1 000 de plus qu’en 2023. Autant les membres de gangs que les forces de l’ordre sont responsables d’exécutions sommaires, de lynchages et d’autres violations graves de droits humains. Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, a déclaré que « depuis longtemps l’impunité pour les violations des droits de l’homme et les abus, ainsi que la corruption, restent prévalents en Haïti, constituant certains des principaux moteurs de la crise multidimensionnelle à laquelle le pays est confronté, ainsi que des inégalités économiques et sociales enracinées ». Cette déclaration confirme l’ancrage profond de la crise au sein de la société haïtienne, et peut remettre en question l’investissement en personnel humain de la part de nations étrangères, alors que le personnel sécuritaire haïtien est en partie responsable de la situation.
Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a également rappelé le régime de sanctions du Conseil de sécurité à l’encontre de Haïti ainsi que l’embargo sur les armes en vigueur. Les armes arrivant en Haïti arrivent rapidement entre les mains de gangs, leur offrant un soutien matériel conséquent. L’embargo en vigueur empêche tout État de fournir, de vendre ou de transférer des armes à Haïti, depuis ou à travers son territoire. Cet embargo a été reconduit dernièrement par la résolution 2752 (S/RES/2752) pour un an, jusqu’au 18 octobre 2025.
Rédaction : Augustin Bollue, assistant de recherche au GRIP et à l’OBG.